Transition à la Clusaz, un village qui repense son modèle économique et environnemental
Le monde change, et c’est également le cas dans les Alpes. Il n’est pas un territoire, pas une entreprise, pas un citoyen qui depuis quelques mois n’ait modifié son mode de vie, de production et de consommation afin d’amoindrir son impact carbone et laisser la plus petite empreinte possible sur la planète.
Comment La Clusaz, village de montagne habité du massif des Aravis perçoit-il ce phénomène ? Comment se prépare t’il aux 30 prochaines années ? Comment envisage t’il l’avenir, celui de ses enfants, de ses petits enfants ? Comment s’inscrit-il dans une économie de montagne « décarbonnée » ? Comment le ski qui l’a fait grandir, va lui permettre d’écrire les prochaines pages de son histoire ?
IMAGINER LA TRANSITION, UN AUTRE AVENIR ET AGIR
Les premières décisions courageuses de transition d’une équipe municipale fraichement élue ont définitivement marqué les esprits. C’est une autre conception de l’urbanisme de l’habitat de montagne : construire moins, construire mieux.
Renoncement officiel de la collectivité aux projets d’extension du domaine skiable et d’équipement de la combe de la Creuse, arrêt de l’urbanisation du secteur des Chenons et de l’implantation du Club Med, fin des opérations immobilières, créatrices de lits froids.
La Clusaz a clairement pris un nouveau virage et s’est engagée dans un processus de transition environnementale, économique et touristique. « La priorité c’est d’avoir une politique de l’habitat plus performante ». Ces engagements majeurs et courageux attestent de la volonté locale de se tourner vers un modèle alternatif et une gestion respectueuse de son patrimoine naturel et environnemental.
BILAN CARBONE ET OBSERVATOIRE ENVIRONNEMENTAL
L’environnement au coeur de chaque projet.
Dans cette optique, La Clusaz travaille à l’établissement de son bilan carbone et à la création d’un Observatoire environnemental local afin de mesurer et de comprendre l’origine de ses impacts pour mieux les maitriser puis les réduire.
Mesurer, comprendre, travailler, décider et agir… quelques mots qui pourraient résumer les missions entreprises par les pouvoirs publics locaux.
Les premières mesures consistent à mettre en oeuvre la valorisation paysagère du lac des Confins, à changer le mode de chauffage de l’eau de l’espace aquatique, y compris les bassins extérieures l’hiver, en réduisant la dépendance au fioul, à l’aide d’un système de pompe à chaleur innovant.
D’autres projets communaux, permettront d’envisager l’aménagement du bourg, et la réduction des flux de circulation.
Pour soutenir et suivre l’ensemble de ce programme, la commune a recruté un chargé de mission spécialement dédié à l’environnement.
VERS LA SORTIE PROGRESSIVE DU TOUT-SKI… FINANCÉE PAR LE SKI
Ça peut paraitre paradoxal, mais la sortie du tout-ski passera par le ski. Pour de multiples raisons :
Le ski est une activité « redistributive », 1 euro de recettes engendrées par les remontées mécaniques génère 7 euros de retombées économiques locales, et plus encore dans les territoires de proximité. Le tourisme à la Clusaz crée 2000 emplois locaux, directs et indirects.
La SATELC, gestionnaire des remontées mécaniques de la Clusaz, est une société d’économie mixte, qui réinjecte ses revenus dans le développement local. Elle est fortement impliquée dans le processus de transition et participe activement à la création de nouvelles activités multi-saisonnières, dont le vélo sous toutes ses formes, l’implantation d’activités alpines de loisir et de découverte, de « micro-aventures » à imaginer. La commune s’est ainsi lancée dans l’élaboration d’un master plan de diversification de ses équipements touristiques, sportifs, culturels et de loisirs qui permettra de définir la colonne vertébrale de notre désaisonnalisation à l’année des activités.
Un chiffre d’affaires annuel moyen de 20 millions d’eurs permettrait à la SATELC de participer au financement des différentes transitions environnementales et touristiques dans les 30 prochaines années.
La Clusaz et l’économie du ski local profitent de la proximité des grands pôles urbains que sont Annecy, Genève et Lyon. Ils sont autant de leviers puissants de diversification et rendent La Clusaz moins dépendante des flux internationaux.
De nombreuses pistes de développement sont à l’étude. Les différents services de la mairie, élus et socioprofessionnels locaux, l’office du tourisme, la SATELC planchent sur de nouvelles perspectives. Mais leur réflexion est ouverte sur le monde et se nourrit de multiples études. La Clusaz s’est constamment réinventée, et reste à l’écoute des « locaux », des « think-tank » et des meilleurs spécialistes qui travaillent sur le sujet.
LE SKI, LA VÉRITABLE HISTOIRE DE LA CLUSAZ
Le ski est le coeur de la Clusaz et patrie du Freeski. Elle a offert à la France rêves, champions et médailles en masse. Guy Périllat, Candide Thovex, Edgar Grospiron, Régine Cavagnoud, Raphaëlle Monod, Vincent Vittoz, Loic Collomb Patton, André Maszewski, Alain Pessey… font partie de la longue litanie des Cluses, légendes mondiales du ski.
Ceux d’aujourd’hui et de demain sont déjà au-devant de la scène dans l’alpin, le nordique le biathlon, le freestyle, l’alpinisme…
Au-delà des champions, le ski c’est aussi l’histoire du développement de la Clusaz, et comme l’évoque Didier Thévenet, Maire de la Clusaz, « sans histoire, pas d’avenir ».
Arrivé dans les années 20, le ski s’est fortement développé après-guerre autour du village séculaire. Il a permis d’éviter l’exode rural et de fixer la population villageoise, qui a créé une économie locale présentielle et a notamment permis l’essor du reblochon.
Naturellement, il ne s’agit pas de renoncer au ski, mais bien de conforter la pratique et le domaine skiable sans l’étendre, en tentant de diminuer chaque année l’impact sur la montagne et l’environnement. Développer une pratique qualitative du ski, notamment en imaginant de nouvelles formes telles que la free-rando, la découverte de panoramas alpins au sommet des remontées, etc…
LA CLUSAZ, UN VILLAGE DE MONTAGNE RÉSILIENT
Pour imaginer un village positif, tourné vers de nouvelles alternatives, il ne fallait pas redouter l’évolution mais penser à une montagne résiliente face aux crises sanitaires, environnementales, économiques et sociales. « Ne pas laisser s’installer des friches touristiques comme il y a des friches industrielles », mais poursuivre un développement raisonné, où la station souhaite s’engager dans la réhabilitation, le réchauffement des lits froids, l’accession à la propriété à des prix raisonnables pour les habitants, l’aménagement de logements pour les saisonniers et naturellement l’entretien et la valorisation du patrimoine local. C’est une voie étroite certes, mais un pari possible à l’images de crêtes de nos montagnes.
Aménager des espaces de travail, créer les conditions d’une activité et d’une fréquentation à l’année, penser 4 saisons, imaginer de nouvelles formes d’attractivité… sont autant de pistes sur lesquelles travaille la Clusaz.
Mais pour fixer une population et financer l’ensemble de ces projets, il sera nécessaire de maintenir le ski et de préserver la ressource en eau… indispensable à la vie à l’année.
VERS LA CRÉATION D’UN NOUVEAU BASSIN D’ALIMENTATION EN EAU POTABLE À LA COLOMBIÈRE
« Nous avons besoin de renforcer nos ressources en eau potable ! » explique Didier Thévenet, Maire de la Clusaz. « Par sa géologie, La Clusaz ne retient pas l’eau et ce n’est pas d’aujourd’hui ». En effet, à l’instar du Vercors, la géologie locale est calcaire et laisse filer l’eau…
Didier Thévenet ne manque pas de rappeler l’époque des années 60 lors desquelles l’eau était coupée « la nuit pour remplir les réservoirs » ainsi que les sécheresses de 1976, 2003 et 2018, « sans parler de celles à l’avenir, plus nombreuses et plus fortes ».
Certes, l’évolution du climat engendre un volume de précipitations à peu près équivalent à ce qu’il était par le passé, mais sous forme de précipitations moins fréquentes et plus violentes. Si l’eau potable n’est pas captée lors de ses épisodes, les risques de pénurie en eau vont augmenter. Les retenues existantes sont alimentées par des eaux de ruissellement dont la qualité n’est pas compatible avec les critères de potabilité.
L’ARS – Agence Régionale de Santé – a par ailleurs rappelé la nécessité de s’équiper rapidement d’une telle réserve d’eau potable, et de la protéger. En l’absence de réserves souterraines suffisantes au lieudit le Bossonnet, il est devenu nécessaire de « mettre toutes les cartes sur la table ».
Entre les quatre bassins existants (Crêt du Merle, la Ferriaz, l’Étale, le Lachat) et les sept autres lieux étudiés dont le col des Aravis ou encore le lac des Confins, c’est finalement l’option du bassin de la Colombière qui a répondu aux exigences du conseil municipal et correspond aux besoins futurs en eau potable et en neige de culture (148 000 m3).
Situé au lieu-dit de La Colombière, cet espace n’empiète ni sur la zone Natura 2000, ni sur les zones humides protégées, et ce contrairement à certaines allégations. Les autres retenues sont le réceptacle des eaux de ruissellement impropres à la consommation. Le nouveau bassin collinaire de La Colombière sera alimenté, quant à lui, par des sources et de l’eau propre à la consommation humaine. Son périmètre d’accès sera protégé.
LE BASSIN DE LA COLOMBIÈRE : UN PROJET QUI CORRESPOND À LA TRANSITION ÉCONOMIQUE ET ENVIRONNEMENTALE SOUHAITÉE
Le premier adjoint de la commune de La Clusaz Michael Donzel a présenté les 11 sites susceptibles d’accueillir la retenue collinaire. L’économie et l’environnement font partie des « grands équilibres » qu’entend préserver l’équipe municipale. D’où l’importance de cette retenue collinaire d’eau « potable, indispensable à la population, aux troupeaux et pour conforter la neige de culture nécessaire au ski et à la transition ».
Le conseil municipal du 29 avril dernier a décidé à la quasi-unanimité de retenir le site de la Colombière pour réaliser le projet. Le Maire va rencontrer l’ensemble des opposants au projet et saisir le préfet de l’organisation de l’enquête publique.
LA CLUSAZ TRANSITION : ACCÈS À L’INFORMATION ET UNE GOUVERNANCE TRANSPARENTE
Les habitants et plus largement les amoureux du village doivent pouvoir trouver en temps réel, toutes les informations disponibles sur les projets d’aménagement de la commune. Ainsi chaque semaine, vous pourrez retrouver en ligne les principaux rapports d’expertises, permettant à chacun d’étayer sa réflexion et de se forger son propre avis. Une volonté de transparence nécessaire, car chaque citoyen a le droit de savoir.